J’ai vécu mon enfance à Ornans où j’ai parcouru ma scolarité. J’ai poursuivi ensuite sur Besançon et je suis partie trois ans à Montbéliard pour effectuer mes études d’infirmière. Comme les petites filles, je voulais me marier, avoir plein d’enfants, une grande maison, un chien…
J’avais une grande passion pour le chant. Vers l’âge de 14 ans, j’ai commencé à chanter les psaumes à l’église de la paroisse. J’ai fait beaucoup d’animations dans le cadre du mouvement eucharistique des jeunes. Notre-Dame du Chêne est un lieu auquel je suis très attachée, j’aimais aller m’y retrouver.
Quand j’ai annoncé que j’allais faire mon entrée au Carmel de la Paix à Mazille, une communauté cloîtrée, et qu’il n’y a pas la possibilité de retour dans le sens où je ne rentrerai plus jamais à la maison, forcément ça surprend ! Mais mes parents et mes amis peuvent venir me voir quand ils veulent…
Au tout départ quand la question s’est posée, j’avais peur de ne pas être comprise. Et puis finalement j’ai eu des réactions très positives parce que je pense que justement quand on me connaît bien, on n’est pas surpris par ma démarche. Je n’ai jamais caché ma foi ou les engagements que je prenais. C’est vraiment vers l’âge de 15/16 ans que je me suis rendue compte qu’il se passait quelque chose. Il y a certains chants qui m’ont procuré de grandes émotions mais voilà j’étais encore un peu rebelle. J’ai quitté l’Église pendant un an et demi et pourtant au fond de moi j’avais toujours «ce petit quelque chose» qui travaillait et que j’ai beaucoup refoulé. J’ai vécu ma vie d’adolescente et puis plus tard c’est revenu mais plus intensément.
En 2008, j’ai rencontré le Carmel en faisant « un week-end en silence ». Je pense que j’ai découvert une partie de moi que je ne connaissais pas. Ça m’a beaucoup remuée et il m’aura fallu encore un an et demi avant de faire la démarche, d’y retourner une deuxième fois. Et la deuxième fois c’était clair ! Je suis revenue très souvent et de plus en plus longtemps et c’était vraiment une évidence le jour où au fond de moi je me suis dit : ma vie, le sens de ma vie est ici ! C’était une explosion de sentiments que l’on est incapable d’expliquer. C’est une nouvelle étape, un pas de plus sur cette promesse. Il y aura au bout d’un an environ mon entrée au noviciat avec la prise d’habit…
Le choix d’entrer au Carmel est une décision assez radicale puisque l’on se met en retrait de la société pour justement être au plus proche de l’humanité.
Ça a été dur aussi pour moi quand j’ai fait ce choix qui demande beaucoup de renoncements. Oui renoncer à toutes les technologies à l’heure actuelle, alors qu’au Carmel c’est se nourrir de l’essentiel, être au plus proche du monde, au plus proche de la création. Cette vie là me procure une joie, une paix intérieure. C’est vraiment un état de bien-être profond et une envie d’avancer sur ce chemin. J’ai eu une accompagnatrice spirituelle pendant plusieurs années car il m’a fallu du temps pour me poser les bonnes questions, pour faire une relecture de soi et de Dieu. Je suis passée par des moments très durs, de doutes extrêmes, des moments de joie et d’impatience de m’engager.
Les journées sont rythmées par les temps de prière. Le premier office des laudes à lieu à 7h suivi de l’oraison silencieuse, une heure de prière en silence jusqu’à 9h30. Il y a le petit déjeuner puis il y a un travail plus personnel. Tous les jours, la messe à 11h suivie du repas à midi. Une répétition de chant et à partir de 14h un travail plus communautaire dans les champs car il y a une exploitation agricole avec des vaches, des moutons… Et à 17h30 il y a l’office des vêpres suivi d’une heure d’oraison silencieuse. Le repas puis un temps plus personnel de 20h à 21h et le dernier office à 21h. Je ne suis pas la seule jeune à entrer dans cette communauté monastique. Actuellement la plus
jeune a 25 ans.
Et mon avenir ? Il faut encore compter sept ans avant un engagement définitif… alors Dieu seul le sait !
Témoignage recueilli par Alain BULLE



